Ankama, le manga en version française

Publié le par Laurent Checola

Avec ses graphismes colorés et son univers pastoral, le jeu vidéo Dofus semble façonné par des maîtres de l'animation japonaise. Mais ce jeu créé en 2004, qui a déjà séduit plus de 150 000 joueurs francophones, n'est pas le fait d'un studio nippon : Dofus a été conçu dans le nord de la France, à Roubaix.


Dans une ancienne usine transformée en studio, la société Ankama a réalisé un monde persistant sur Internet en 2D, doté d'une intrigue fantaisiste. Perdu dans les vastes terres d'Amakna, les personnages doivent chercher des objets, coopérer avec d'autres joueurs, mais aussi combattre avec des armes ou des objets magiques. Il faudra de longues heures aux héros pour obtenir les six "dofus", des œufs de dragon dotés de pouvoirs, but ultime du jeu.


Humour et action sont les principaux ingrédients de cette bonne farce ludique. L'accès gratuit aux fonctions principales du jeu, ainsi que sa très facile prise en main, contribuent à asseoir son succès. "Nous voulions atteindre un large public, et éviter de nous concentrer sur une seule cible", indique Alix Lépinay, d'Ankama. Un autre monde virtuel semble possible, au-delà de la mainmise de World of Warcraft, qui domine le marché, avec plus de huit millions d'abonnés.


Une variante – payante – nommée Dofus Arena, sortie peu de temps après, propose de nouveaux défis aux joueurs avides de combats épiques. L'équipe d'Ankama s'attelle désormais à son prochain jeu : Wakfu. Fin 2007, les joueurs pourront redécouvrir l'univers de Dofus, mille ans après. Les graphismes et le système de jeu ont été profondément remaniés. "Nous avons beaucoup appris de notre premier jeu. Désormais, nous allons viser le marché européen, mais aussi nord-américain et asiatique", précise M. Lépinay.


MONDES PARALLÈLES

Outre les activités ludiques, Ankama dispose d'un pôle édition, très actif. "Après le jeu, nous pensions à un support peu cher pour décliner notre produit. Le format manga s'est aussitôt imposé. Nous avions alors deux possibilités : nous inféoder à une maison d'édition, ou tout faire nous-mêmes. Nous avons choisi la seconde solution", sourit le responsable d'Ankama. Cinq tomes de la version manga de Dofus sont déjà parus. Régulièrement en rupture de stock, ils se vendent à plus de 15 000 exemplaires.


"Plutôt que de dépenser des milliers d'euros en publicité, pourquoi ne pas faire de la communication plus intelligente en proposant des beaux livres et des mangas de qualité ?", s'interroge Alix Lépinay. Le pôle édition, désormais bien structuré, commence à prendre ses distances avec l'univers de Dofus et part en quête de nouveaux talents. Comme Bertrand Hottin, l'auteur de Pandala, sorti début avril. Entre "art book" et manga, l'auteur utilise une technique proche des celluloïds japonais, qu'il crayonne avant de gouacher. "Un hommage à Miyazaki", la référence en animation japonaise, glisse l'un des dessinateurs. Les dessins se suffisent à eux-mêmes, et ne sont agrémentés d'aucun dialogue.


Dans un registre très différent, le deuxième titre d'Ankama éditions, Mutafukaz, signé Guillaume Renart, est une parodie de séries B et un clin d'œil aux comics américains. "Nous souhaitons établir des univers parallèles, favoriser les passerelles entre les médias", résume Alix Lépinay. L'interaction entre les différents supports va se poursuivre, puisque l'univers de Wakfu sera très prochainement porté sur le petit écran.


Article paru dans lemonde.fr du 20 avril 2007 

Publié dans Modes

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